de Astrid De La Chapelle
16mm sur vidéo, couleur, son, 15’, 2021
Au départ, il y a une simultanéité. Un fossile marin de crinoïde mis à jour près du sommet de l’Everest, un célèbre alpiniste britannique qui s’évapore, et un leader russe qui s’éteint sont le point de départ d’une histoire de la transformation de la matière.
Le film est une exploration libre et transversale des matières terrestres et de leurs transformations. Les corps conservés de George Mallory et de Lénine, l’un pétrifié par les conditions climatiques, l’autre embaumé grâce à la pétrochimie, sont devenus en quelque sorte les achèvements éternels des pensées politiques ou des idéologies qui les ont portés. Pour le premier, la pensée pionnière liée à l’impérialisme britannique, pour le second, l’édification du communisme. Les corps de ces hommes ont permutés leur cycle organique originel pour se nicher au sein d’autres cycles plus vastes de la Terre. Ces corps persistent. De la forêt du Carbonifère d’il y a 300 millions d’années au charbon, et du charbon à la révolution industrielle qui active l’économie soviétique nouvelle du début du XXème siècle ; des micro-organismes d’autrefois au pétrole, du pétrole à la pétrochimie, et de la pétrochimie à l’embaumement expérimental du corps de Lénine ; ou encore d’autres micro-organismes tombés au fond des mers au calcaire, puis du calcaire au marbre et enfin des carrières de marbre exploitées aux cuisines contemporaines … Les époques et les échelles se brassent et se croisent. Réalisé en 16 mm, au téléphone portable et avec des images trouvées sur internet, les régimes d’images variés et les grains intrinsèques à chaque média se télescopent et se fondent dans un flux presque hallucinatoire.
Le titre Corps Samples peut se lire en français et en anglais ; il joue sur les mots dans les deux langues, et signifie phonétiquement en anglais : la carotte géologique.